Clap de fin pour les filtres Instagram

  1. Clearview AI jugée “illégale” par les autorités canadiennes de protection de la vie privée.

  2. Les influenceurs britanniques interdits de filtres trompeurs sur Instagram.

  3. Huawei ne veut plus être considéré comme une menace pour les États-Unis.


Clearview AI jugée “illégale” par les autorités canadiennes de protection de la vie privée.

Les autorités canadiennes ont déclaré que la société avait besoin du consentement des citoyens pour utiliser leurs informations biométriques.

Spécialisée en reconnaissance faciale

Clearview AI est une entreprise new-yorkaise spécialisée dans la reconnaissance faciale qui défraie la chronique depuis l’année dernière. Son but? Identifier des individus grâce aux images récupérées sur les réseaux sociaux, sans autorisation, en créant une gigantesque base de données consultable. Pour identifier une personne, il suffit de charger une photo et le logiciel tente d’établir une correspondance.

Constamment mise à jour, cette base de données est ensuite vendue aux services de police et aux agences fédérales selon Clearview. Cependant, de nombreux rapports indiquent que la société a également donné accès à d’autres clients, notamment des milliardairesWalmart ou Macy’s, la NBA, et même certaines écoles. Utilisée massivement récemment suite à l’attaque du capitole, Clearview AI est loin de faire l’unanimité de l’autre côté de la frontière.

Vive réaction canadienne

L’application de reconnaissance faciale Clearview AI n’est pas la bienvenue au Canada et la société qui l’a développée devrait supprimer les visages des Canadiens de sa base de données, a déclaré mercredi Daniel Therrien, commissaire à la vie privée du pays.

Dans un rapport commun du 2 février dernier, plusieurs agences canadiennes de protection de la vie privée ont révélé que la société américaine avait recueilli des informations biométriques très sensibles sans consentement et qu’elle «utilisait et communiquait les informations personnelles des Canadiens à des fins inappropriées». Le rapport rajoute que la récupération de photos disponibles sur les médias sociaux et autres sites publics et leur partage aux forces de l’ordre est illégal et porte préjudice à tous les membres de la société en instaurant un climat délétère.

«Clearview AI ne collecte que des informations publiques sur Internet, ce qui est explicitement autorisé. C’est un moteur de recherche qui recueille des données publiques tout comme le font les grandes entreprises, dont Google, qui est autorisé à opérer au Canada» s’est défendu la société américaine, exprimant d’ores et déjà sa volonté de contester cette décision au tribunal.

Un logiciel plus que controversé

Ce n’est pas la première fois que la société américaine est épinglée pour ses agissements. En mai dernier, l’entreprise s’est vue forcée de résilier ses contrats en Illinois (USA) suite à une procédure judiciaire qui l’accusait de violer la loi sur la protection des informations biométriques. Mais malgré cette réputation sulfureuse, l’utilisation de Clearview AI par les forces de l’ordre a augmenté de 26% au lendemain de l’attaque du Capitole. De quoi créer un précédent alarmant selon l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) qui s’inquiète de voir l’utilisation de la reconnaissance faciale normalisée.

D’un point de vue européen, Clearview AI n’a pas encore précisé si certaines de ses photos collectées concernaient des citoyens des états membres. Toutefois, si tel était le cas, le logiciel violerait l’article 4.14 relatif au traitement des données biométriques du règlement général sur la protection des données (RGPD). «Ces technologies n’opèrent pas dans un vide juridique. L’utilisation de données personnelles est soumise aux règles strictes du RGPD. [Celui-ci] prescrit une base juridique bien définie et un objectif légitime ; la personne concernée doit être au courant de la procédure, elle doit pouvoir obtenir réparation et [posséder] des moyens de vérification » précise un porte-parole de la Commission européenne.

Sur le sujet: «The secretive company that might end privacy as we know it» par le New York Times.


Les influenceurs britanniques interdits de filtres trompeurs sur Instagram


En interdisant l’utilisation de filtres Instagram dans les publications promotionnelles de produits cosmétiques, le législateur britannique fait un pas en avant vers un environnement digital plus éthique et davantage soucieux de la protection des consommateurs.

#FilterDROP

Cette interdiction fait suite à l’action de la maquilleuse Sasha Pallari, initiatrice de la campagne #FilterDrop qui avait pour objectif de voir « plus de vraie peau » sur Instagram. Loin de s’arrêter à cette initiative, Pallari a rapporté à l’autorité des normes publicitaires (ASA) deux cas particulièrement alarmants où des influenceurs utilisaient un filtre modifiant le visage tout en étant payé pour démontrer les avantages d’un produit de bronzage.

Après analyse, l’ASA a estimé que les filtres utilisés exagéraient de manière trompeuse l’effet que le produit était capable d’obtenir et que les publicités étaient manifestement susceptibles d’induire les consommateurs en erreur – et ce, même si le nom du filtre est mentionné dans la publication.  La décision s’applique à toutes les marques, influenceurs et célébrités britanniques et précise qu’en cas d’infractions à cette nouvelle règle, les publications litigieuses pourront être retirées d’Instagram et interdites de republications.

Instagram et l’industrie de la beauté


Pendant longtemps, Instagram et le lot d’influenceurs qu’il a développé ont reflété une image plus fiable et plus proche des consommateurs qui a très vite plu aux entreprises. Le principal avantage résidait dans le fait que, contrairement aux médias plus traditionnels, il n’existait que peu de réglementation ou de code d’éthique à suivre pour ces influenceurs. Ce succès, largement aidé par l’avènement des tutoriels beautés sur Youtube, a permis de démocratiser les produits et pratiques de soins de la peau, de coiffure ou de maquillage auprès du grand public. Mais sans réglementation adaptée, l’industrie du marketing d’influence s’est rapidement transformée en milieu néfaste, où les entreprises de cosmétiques pouvaient une fois de plus encourager une esthétique inaccessible aux femmes.

C’est donc un changement important à prendre en considération pour une industrie de la beauté qui dépense toujours sans compter sur Instagram. À titre d’illustration, Maybeline dépense 60% de son budget promotionnel consacré aux réseaux sociaux à la promotion de ses produits sur Instagram, Sephora y dépense 43% de son budget et Estee Lauder 46%.

«J’ai l’impression que l’effet néfaste que cela a sur les utilisateurs a enfin été pris au sérieux et c’est un grand pas dans la bonne direction en ce qui concerne la façon dont les filtres sont utilisés et la façon dont les produits cosmétiques sont promus en ligne» a réagi Sasha Pallari suite à la décision. «Je peux désormais aider à changer la façon dont ces femmes se voient dans le miroir et c’est formidable», a-t-elle ajouté.

Sur le sujet: «The impact of Instagram use in young women»
 


Huawei ne veut plus être considéré comme une menace pour les États-Unis

L’autorité italienne chargée de la protection (Garante per la Protezione dei Dati Personali) des données a ordonné à l’application de partage de vidéos TikTok de bloquer temporairement les comptes des utilisateurs «pour lesquels il n’y a pas de certitude absolue quant à l’âge et, par conséquent, au respect des dispositions liées à l’exigence de données personnelles». Cette demande fait suite à la mort accidentelle d’une fillette de 10 ans, asphyxiée en participant au défi du «jeu du foulard». TikTok a jusqu’au 15 février pour répondre à l’autorité italienne.

Une menace pour la sécurité intérieure

Le 30 juin dernier, après plusieurs semaines de sorties médiatiques de la part de l’administration Trump, la Federal Communications Commission (FCC) a officiellement qualifié Huawei et ZTE, deux acteurs majeurs des télécoms chinois, comme dangers pour la sécurité nationale des États-Unis.

Ajit Pai, président du FCC nommé par Trump en 2017 et partisan de l’abrogation de la neutralité du Net, précise : «Sur la base de preuves accablantes, la FCC estime que Huawei et ZTE représentent des risques de sécurité nationale pour les réseaux de communication américains et pour l’avenir de la 5G. Les deux sociétés ont des liens étroits avec le Parti communiste chinois et l’appareil militaire chinois. Nous savons qu’elles sont totalement soumises à la loi chinoise les obligeant à coopérer avec les services de renseignement du pays». Une décision lourde de conséquences pour l’entreprise chinoise. Considérée comme dangereuse, Huawei ne peut plus accéder à certains marchés financiers et contracter librement. De plus, cette décision interdit aux entreprises américaines de télécommunications d’utiliser les subventions gouvernementales pour acheter des équipements à ces deux géants chinois.

Pour Huawei, l’entrée en fonction de Joe Biden en tant que 47ème président des États-Unis portait l’espoir de ressurgir sur le devant de la scène américaine. Pourtant, l’administration actuelle a réitéré son soutien à la décision, «l’année dernière, la FCC a publié une désignation finale identifiant Huawei comme une menace pour la sécurité nationale, basée sur un ensemble substantiel de preuves développées par la FCC et de nombreuses agences de sécurité nationale américaines. Nous continuerons à défendre cette décision», a déclaré un porte-parole au média américain The Verge.

Huawei espère un retournement de situation

Dans une requête auprès de la Cour d’appel de la cinquième circonscription, la société basée à Shenzhen a estimé que sa désignation par la FCC de menace pour la sécurité nationale violait la constitution américaine. Selon Huawei, l’interdiction faite aux entreprises américaines d’utiliser l’argent gouvernemental pour se procurer des produits de leur société est « arbitraire, capricieuse … et non étayée par des preuves substantielles ».

Pourtant, à en croire les dernières déclarations des acteurs concernés, l’issue semble loin d’être favorable pour le fabricant chinois. Jen Psaki, attachée de presse à la Maison-Blanche a précisé que l’administration n’autoriserait pas que les « opérateurs douteux, y compris Huawei » soient impliqués dans les réseaux de télécommunications américains. De son côté, le dirigeant de Huawei a tenté d’apaiser les tensions en exprimant sa volonté d’ouvrir les discussions avec Joe Biden en vue d’un assouplissement des mesures.

Signe que les tensions entre les États-Unis et la Chine ne s’apaiseront pas de sitôt, Antony Blinken, secrétaire d’État, a profité de sa première conversation avec son homologue chinois pour avertir Pékin que Washington lui demanderait des comptes pour ses abus et son comportement répressif, notamment envers la minorité ouïghoure. De quoi refroidir très vite les espoirs de Huawei…